8 juin 2020 door Darja Murzina
Les changements climatiques nous apportent des précipitations toujours plus extrêmes, mais notre sol est trop sec. Comment est-ce possible?
Il y a deux raisons à cela. Premièrement, la pluie doit tomber au bon moment. Lorsqu’il pleut en été, la pluie est en fait immédiatement absorbée par les plantes dans la couche supérieure. On appelle cela l’évapotranspiration. En été, la végétation absorbe plus d’eau qu’il ne peut en pénétrer dans la terre. Les réserves d’eau souterraine ne sont pas rechargées en été. Lorsque la saison est normale, les nappes phréatiques ne commencent à se recharger qu’à partir d’octobre. Toute l’eau qui tombe en été retourne dans l’atmosphère. C’est l’eau qui tombe en automne, en hiver et au début du printemps qui va effectivement s’infiltrer et recharger les réserves de la nappe souterraine.
Deuxièmement, il est très difficile de prévoir si ce sont précisément les hivers ou les étés qui vont être plus humides. Il y a des glissements à ce niveau. Ce n’est pas encore clair pour la Belgique. Pour d’autres pays, il est d’ores et déjà clair qu’il y a des bouleversements et que ces derniers vont entraîner des problèmes. Le problème avec les précipitations extrêmes, c’est qu’elles ne sont pas très efficaces. C’est très clair quand on examine le cycle de l’eau de pluie. Plus l’eau tombe vite et plus les périodes sur lesquelles elle tombe sont courtes, plus le cycle sera superficiel. Plus les averses de pluie sont lentes et soutenues, plus les chances que l’eau pénètre efficacement et recharge les nappes profondes d’eau souterraine seront grandes. Les nappes profondes sont finalement le réservoir tampon. Non seulement pour nous, mais aussi pour la nature, pour garantir que tout puisse continuer à être alimenté en eau de pluie. On peut avoir la même quantité sur une période très courte, mais elle sera très vite perdue. Il y a différentes manières de résoudre ce problème. On peut installer, par exemple, des bassins de rétention. Le climat belge classique marqué par un été long et humide et un hiver long et humide est, en fait, le meilleur moyen de recharger les réserves d’eau souterraine, mais nous l’avons un peu perdu.
Quelle sont les conséquences de la sécheresse pour les rivières et les ruisseaux?

Une rivière est alimentée par les eaux souterraines. Un ruisseau peut être une sorte de canal de drainage. Les Pays-Bas en sont évidemment un très bon exemple. Les Néerlandais ont utilisé les ruisseaux et les canaux pour assécher le pays. C’est aussi partiellement le cas en Belgique. Les rivières sont efficacement alimentées par les eaux souterraines. Lorsqu’on souffre d’un déficit structurel en eau souterraine à long terme, on le remarque également aux rivières. Cela dépend aussi un peu de la rivière. Il y a des rivières qui réagissent beaucoup plus vite aux précipitations que d’autres, de manière naturelle. La Meuse est une rivière qui en amont n’est pas navigable partout pendant toute la saison. Il existe d’autres rivières qui n’ont pas ce problème ou qui l’ont à un bien moindre degré. En règle générale, le niveau trop bas des rivières peut être une conséquence de la sécheresse. De ce fait, les canaux de jonction souffrent eux aussi de niveaux d’eau trop bas, car ils sont fréquemment alimentés par les rivières. Nous parlons alors de sécheresse de niveau trois. Il s’agit de la sécheresse qui se fait sentir dans les réserves d’eau souterraine.
Quelles sont les conséquences d’un sol toujours plus sec pour le niveau des eaux souterraines?
Parler de la quantité de précipitations est une chose, parler d’un sol sec en est une autre et cela n’équivaut pas à un niveau bas des eaux souterraines. Dans des cas extrêmes, il peut même arriver que le sol soit encore très sain, même si le niveau des eaux souterraines est en train de baisser et qu’il y a moins de précipitations. Tout simplement parce que le sol, lorsqu’il présente une composition appropriée, peut absorber très efficacement l’humidité. S’il est recouvert d’une végétation adaptée, le sol même peut rester parfaitement intact. Alors qu’en fait, il y a moins d’eau. Toutes ces choses sont possibles et il faut en tenir compte pour faire face aux conséquences du réchauffement climatique. Un sol sain est important pour la végétation ou pour d’autres finalités, mais on peut toujours être confronté à des problèmes de déficit en eau souterraine qui empêchent de pomper cette eau ou de rivières qui ont un faible niveau d’eau souterraine.
Quelles sont les conséquences d’un sol toujours plus sec dans les zones côtières?
Dans les zones côtières, la sécheresse croissante provoque une salinisation des nappes souterraines. Ce phénomène est de tout temps un problème aux Pays-Bas, car ils ont effectivement une partie de leur territoire sous le niveau de la mer. En Belgique, le pourcentage de territoire sous le niveau de la mer est inférieur, mais la situation n’a pas changé, lorsqu’on fore tout près du littoral, on tombe toujours sur de l’eau salée. Dans une zone telle que le littoral, on obtient une sorte d’infiltration d’eau de mer qui se poursuit en profondeur. Lorsqu’on irriguait ou que l’on pompait de l’eau sur la côte, il fallait veiller à ne pas faire remonter l’eau salée en pompant. Avec le réchauffement climatique, on observe une légère remontée du niveau des mers. On a aussi davantage de tempêtes. D’un côté du littoral, la pression exercée par l’eau salée est supérieure et de l’autre, on a moins de précipitations. Et parce qu’il fait plus chaud, l’homme a besoin d’une plus grande quantité d’eau potable et commence précisément à pomper plus d’eau. C’est une des raisons pour lesquelles les zones côtières sont si sensibles au problème du réchauffement climatique. La question n’est pas seulement de savoir quelle quantité d’eau est présente, il faut également veiller à ne pas commencer à faire entrer de l’eau salée dans le sol. Et si on commence à le faire d’une manière relativement extrême, on peut même provoquer une salinisation des sols. Ce que l’on veut bien sûr éviter à tout prix.
Quelles sont les conséquences de la sécheresse pour notre eau potable?
L’une des principales conséquences est que l’eau potable connaît actuellement une situation tendue. Je crois que deux tiers de l’eau que nous utilisons en Belgique proviennent des nappes phréatiques. En Flandres, il s’agit de 50 %, car une grande partie de cette eau provient encore des eaux de surface, comme le canal Albert. En Wallonie, les eaux souterraines sont dominantes. Nous pompons donc effectivement les nappes souterraines pour en remonter l’eau et l’utiliser. Nous appelons cela de l’eau potable, mais cette eau n’est pas destinée en totalité à être bue. Elle est utilisée par les ménages, mais aussi par l’industrie qui entre les eaux de traitement et l’eau de refroidissement en consomme une part très importante. Le secteur agricole en utilise évidemment lui aussi une partie. On peut évidemment se demander dans quelle mesure nous avons besoin d’eau de qualité potable pour certains processus industriels. Ce sont des choses qui peuvent être optimisées. Dans le passé, on pouvait tout simplement demander une autorisation pour exploiter un puits d’eau potable. Si cette demande était acceptée, vous pouviez pomper autant d’eau que votre autorisation le permettait, et vous pouviez l’utiliser comme bon vous semblait. C’est quelque chose qui commence lentement mais sûrement à changer de plus en plus. Nous tenons désormais davantage compte de l’utilisation finale. De quelle qualité d’eau a-t-on besoin pour telle et telle activité ? Il va falloir dresser une sorte de liste qui fixe un ordre de priorités, afin de pouvoir garantir l’approvisionnement en eau potable. Au cours d’étés secs par exemple, vous n’avez plus le droit de laver votre voiture. C’est un des exemples bien concrets de ce genre de règles de priorité. Il va falloir faire des choix, et ces choix sont imposés par la rareté.

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Kris Piessens

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